Projet CONSACRE

Problématique

• Comment maintenir et restaurer la libre circulation des poissons dans la Vallée de la Seine ?

Contexte et détail du projet CONSACRE

La diversité et les effectifs de poissons ont subi un déclin depuis deux siècles dans la vallée de la Seine, qui comprend le fleuve et ses affluents de la source à l’estuaire. Mais les efforts de réglementation, de planification et les aménagements réalisés ont amélioré la situation de certaines espèces. Ainsi, des truites de mer ont été enregistrées à la station de vidéocomptage des poissons de Carandeau sur la rivière Aisne en 2017. La même année, un individu a été capturé par un jeune pécheur à Chauny sur la rivière Oise, à 450 km de la mer et après 11 obstacles franchis lors de sa migration !

Le projet CONSACRE, CONtinuite écologique de la Seine et interêt des ACteurs pour sa REstauration, a l’ambition d’analyser d’un point de vue global et local, la continuité écologique piscicole de l’axe Seine. L’objectif est de proposer des pistes d’actions, qui concernent d’une part les possibilités d’aménagements pour la préservation et la restauration des milieux naturels, et d’autre part l’amélioration de l’association des différents publics impliqués dans cette problématique.

Pour se faire, l'étude se décline en cinq axes en interraction.

Détail des cinq axes de travail

Axe 1 : Continuité écologique piscicole actuelle à l’échelle de l’axe Seine.

La continuité écologique de la Seine et ses principaux affluents est modélisée à l’aide d’une approche géomatique qui représente les cours d’eau par des cartes en deux dimensions et qui permet d’intégrer l’effet cumulé des discontinuités physiques (barrages, seuils, digues…) et chimiques (oxygène,…) sur les potentialités d’accès aux habitats. Cette continuité est calculée de la baie de Seine vers les habitats potentiels amont pour les espèces grands migrateurs. Elle repose sur la cartographie des habitats disponibles pour les besoins fonctionnels des poissons (alimentation, reproduction…) et sur la cartographie des mobilités liées aux facteurs qui facilitent ou empêchent le mouvement des espèces.

Accessibilité de la rivière Risle depuis l’embouchure de l’estuaire pour la truite de mer selon les différents scénarios de gestion. La distance fonctionnelle (classes de km fonctionnels) indique le gradient de cette accessibilité depuis la baie de Seine (projet Anacondha).

La cartographie des mobilités  et des habitats utilisera des modélisations hydro-dynamiques et biogéochimiques réalisée à l’aide des outils du GIP Seine Aval (projet HYMOSED, ECO-MARS de l’Ifremer) et ceux du PIREN Seine (logiciel ProSe). Les variables décrites seront la vitesse de courant, la hauteur d’eau, le niveau d’oxygénation et la température de l’eau. D’autre part, des données descriptives des milieux aquatiques existantes seront mobilisées sur l’ensemble du bassin de la Seine (Recueil de données réalisé par l’UFBSN), complétées par les données de l’association Seinormigr et par l’acquisition de nouvelles données sur les berges de Seine dans le département de l’Eure (réalisation par l’IAU, en cohérence avec le Schéma des berges d’Ile de France).

Le suivi des déplacements réels des poissons sera réalisé à l’aide de la télémétrie acoustique. Une centaine de poissons de différentes espèces (salmonidés, aloses, lamproie marine, etc..), capturés au niveau de la passe à poissons d’Amfreville-sous-les-Monts seront équipés d’émetteurs acoustiques miniatures codés individuellement. Afin de suivre les mouvements et trajectoires temporelles des poissons, un réseau de 70 hydrophones fixes seront déployés pour enregistrer en continu le passage des poissons. Ils seront placés aux lieux stratégiques de passage (N-D La Garenne, Méricourt, Andrésy, Pontoise, autres…) afin d’étudier le comportement des poissons vis-à-vis des divers barrages de navigation, la franchissabilité et leur entrée éventuelle dans les affluents. Mais aussi de manière à couvrir plus précisément le secteur le plus aval (Poses -N-D La Garenne, 40km) et d’étendre les connaissances d’utilisation des habitats à la partie eau douce non tidale de la Seine et  comparer avec les résultats obtenus sur le secteur Rouen-Poses (projet Thalassotok, 2009-2012).

 

Axe 2 : Mise en perspective historique et future.

L’état actuel de la continuité écologique est mis en perspective des situations historiques, de leurs évolutions prévisibles et des effets possibles du changement climatique. L’analyse de l’évolution historique de la continuité écologique sera menée pour identifier les paramètres majeurs qui ont eu une influence sur la continuité écologique du fleuve pour les poissons depuis le XIXe siècle.

Elle s’appuiera sur l’analyse des archives historiques disponibles déjà rassemblées ou identifiées comme l’historique de la mise en place des ouvrages transversaux, l’artificialisation des berges, les données de la qualité de l’eau (oxygène dissous). Des documents numérisés, comme les archives des ingénieurs des Ponts et Chaussées, des cartographies et iconographies, sont disponibles sur le site ArchiSEINE, mis en place par notre partenaire de Sorbonne Université.

La mise en place et les modifications techniques réalisées sur les ouvrages transversaux seront analysées sous l’angle de leur effet sur le franchissement par différentes espèces de poissons (saumon, truite de mer, lamproies marines, aloses…) afin de définir les périodes clefs de l’aménagement et du changement du milieu. L’évolution de la qualité de l’eau, établie par la disponibilité en oxygène, sera réinterprétée en fonction des besoins nécessaires à la survie et aux migrations des poissons.

Des simulations prospectives sous hypothèse de changement climatique, disponibles au sein de la Zone Atelier Seine, permettront d’envisager la modélisation de scénarios de continuité écologique future en lien avec la qualité de l’eau (oxygène, …) et la température. Le Centre de Géosciences de MINES ParisTech, partenaire du projet, mobilisera l’outil de simulation hydro-écologique ProSe, disponible sur la Seine et la Marne depuis l’amont de l’agglomération parisienne jusqu’à Poses. L’outil permet de simuler les flux d’eau (hauteur d’eau, vitesse de courant) et de matière (carbone, azote, phosphore) dans le système au pas de temps 10 min, en tenant compte de la forte anthropisation du milieu (stations d’épuration, rejets de temps de pluie). Le logiciel ProSe sera couplé avec une modélisation des flux à l’échelle du bassin de la Seine intégrant les interactions nappe-rivière (modèle CaWaQS) et forcé par les projections climatiques régionalisées.

 

Axe 3 : Intérêts des acteurs.

La mise en œuvre de la restauration de la continuité écologique se heurte parfois sur le terrain à l’opposition des riverains et usagers et constitue une opération potentiellement conflictuelle. Afin de faciliter la mise en œuvre de ces opérations de gestion dans une démarche d’aménagement durable du territoire, il apparait nécessaire de mieux impliquer les populations concernées dans la construction de ces projets. Pour cela, nous proposons de confronter les démarches de communication accompagnant les projets de restauration de la continuité écologique aux représentations de la rivière de différents groupes d’acteurs concernés.

Des chercheurs de l’Université Paris Nanterre vont réaliser l’inventaire des pratiques innovantes (plaquettes d’information, vidéos, réunions publiques, …) mises en œuvre pour accompagner les projets de restauration de la continuité écologique sur la Seine et ses affluents et qui ont favorisé la mise en place d’un dialogue et la construction de projets de restauration et analyser leur efficacité. Des enquêtes auprès des usagers seront menées en parallèle sur plusieurs sites pour appréhender le rapport des populations concernées avec la rivière et leur compréhension du fonctionnement de l’écosystème Seine et/ou affluents et leur appréhension des enjeux de la CE.

 

Axe 4 : Établir les leviers d’action et mettre en place les scénarios de gestion.

Une synthèse des enjeux de la gestion de la continuité écologique pour les poissons à l’échelle de la vallée de Seine (axe et principaux affluents) sera réalisée à partir des principaux schémas de gestion (PLAGEPOMI, SRCEs en particulier) disponibles sur le bassin Seine. Elle sera étayée des connaissances récentes collectées par SEINORMIGR et auprès des fédérations de pêche par l’UFBSN. Les connaissances acquises par les études récentes sur la problématique des continuités piscicoles sur l’axe Seine seront prises en compte (ex : étude Cerema sur la dévalaison anguille).

Au regard de la synthèse des enjeux, des données disponibles sur les habitats et des capacités des outils, des cas d’études seront proposés. Il sera question de cibler les espèces, les secteurs d’études, les scénarios de gestion à tester, les acteurs à associer et le public ciblé par les enquêtes. L’objectif est de retenir une série de cas d’étude qui permette d’être représentatif des différentes problématiques que posent la continuité écologique longitudinale à l’échelle du bassin.

Des projets connexes au projet Consacre, traitant des aspects complémentaires de continuité écologique seront pris en compte.

  1. Gestion des écluses : Détailler les possibilités d’aménagement des portes des écluses et leur modalité de gestion favorisant le passage des différentes espèces de poissons. Suivi d’une écluse en 2019 (Etude VNF).
  2. Etude des pics de dévalaison des anguilles, cibler et de quantifier au mieux les effets d’arrêts de turbinage pendant la dévalaison (Etude DRIEE/ Seinormigr/ Hydrowatt).
  3. Etude connectivité latérale Brochet (Etude UFBSN, plan Seine 2018): identifier la fonctionnalité des zones humides et l’état des connexions latérales -> 09/2019 – 08/2020 : La Seine (77) et le marais de l’Aure dans le Calvados (Cartographie habitats et télémétrie).

Impact des micro-centrales hydrauliques sur l’oxygénation du fleuve (Mines Paris Tech).

 

Axe 5 : Partage de la connaissance auprès des divers acteurs.

La restauration de la continuité écologique peut être envisagée comme une opportunité pour (re) connecter les riverains avec l’environnement quotidien que constitue la rivière. Il s’agit aussi d’un moyen d’impliquer les populations locales en partageant des savoirs sur la rivière comme cela est plus fréquemment pratiqué dans le monde anglo-saxon. Les réflexions relatives à la communication sur les enjeux devront tenir compte des connexions avec les enjeux du milieu marin.

Une réflexion sur les moyens de restituer les résultats obtenus dans le cadre du projet devra être conduite. Il s’agira à la fois de tester et favoriser, dès cette étape, une compréhension partagée des enjeux des différentes parties prenantes et de créer ou renforcer s’ils le souhaitent leur « appétit » de nature séquanienne. Pour cela, parmi les pistes imaginées : association des publics aux expérimentations scientifiques, mise en place de groupes de discussion locaux, lien à construire avec la vélo-route de Paris à la mer et les ateliers du paysage, présentations et discussions avec le public …

 

Les acteurs du projet

Le maître d’ouvrage du projet CONSACRE est le Groupement d’Intérêt Seine Aval (GIP Seine Aval), projet qui reste à l’initiative de l’IRSTEA d’Anthony qui en est de coordinateur scientifique. Les autres partenaires du projet impliqués dans chacun des 5 axes sont ;

 

 

SEINORMIGR intervient dans l’axe 1 de par son suivi des migrations amphihalines sur la Seine, en particulier en fond d’estuaire de la Seine.

 

Vous pouvez retrouver tous les détails de l'étude sur le site web du projet : https://consacre.irstea.fr/