Journées Techniques Nationales - 2019

Les Journées Techniques Nationales 2019.

Les 27 et 28 Novembre, la Fédération Nationale de la Pêche en France FNPF a organisé la 5ème édition des journées techniques nationales dans le prestigieux amphithéâtre du Muséum national d'Histoire naturelle de Paris, partenaire de l’évènement. L’occasion pour SEINORMIGR de partager devant plus de 280 professionnels les dernières informations concernant les migrateurs en Seine-Normandie, et tout particulièrement les effets de la restauration de la continuité écologique sur la faune migratrice.

Effet des travaux de restauration de la continuité écologique sur les populations de poissons migrateurs à différentes échelles spatiales et temportelles du bassin Seine-Normandie.

 

Vous pouvez visualiser la présentation en cliquant : >> ici <<

 

Propos retranscrits de Mr. Geoffroy GAROT (Directeur de l'association Seine-Normandie Migrateurs)

 

"Nous aurions pu intituler ce que j’ai à vous proposer comme l’impact des travaux de restauration de la continuité écologique sur les populations de poissons migrateurs, impact dans le sens bénéfique du terme, à différentes échelles spatiales et temporelles des cours d’eau du bassin Seine-Normandie.

Une présentation du bassin Seine Normandie : 100 000 kilomètres carrés, à peu près 20 % du territoire national, 10 régions, 30 départements, 55 000 km de cours d’eau, et surtout 600 kilomètres de façade maritime.

La métropole parisienne se trouve au centre du bassin. Cela correspond, à peu de chose près, au territoire d’étude de l’Association par adhésion des Fédérations du bassin. Dans le bassin Seine-Normandie, on a deux unités hydrographiques majeures : le bassin de la Seine d’une part et l’Arc normand constitué de multiples côtiers normands, notamment des affluents de la Seine qui en font partie.

 

La Seine fait partie de cet Arc normand. Ses affluents estuariens constituent le réservoir biologique du bassin de la Seine. Les multiples côtiers normands ont des estuaires voisins jusqu’à 50 ou 60 kilomètres. Ils constituent des zones d’échanges entre les géniteurs qui remontent de manière erratique parfois entre les cours d’eau. Cela permet ainsi de réensemencer l’estuaire de la Seine et de maintenir une petite population fonctionnelle à l’aval du bassin.

 

On constate des reproductions naturelles sur les affluents estuariens de la Seine tous les ans, ainsi qu’à l’amont immédiat de l’estuaire, avec un faible signal notamment de lamproie marine. Sur tous ses petits affluents, tous les ans, on a de la reproduction naturelle aussi bien de lamproie fluviatile, de saumon, de lamproie marine et de truites de mer. Vous avez des faciès salmonicoles de première catégorie qui offrent des surfaces de reproduction favorables à ces espèces. On constate ces reproductions annuelles puisque l’arc normand fait partie d’un gros réseau de suivi en termes d’indice d’abondance, mais aussi de relevé de frayères par les associations et fédérations de cette région.

 

Vous avez des reproductions naturelles ici, mais pourtant, on a un linéaire accessible colonisé encore très faible. Au maximum, des affluents présenteront un tiers de leur bassin accessible à ces espèces et leur permettre la reproduction naturelle. Et en fond d’estuaire, vous avez un ouvrage, le premier ouvrage de Poses, à 160 kilomètres de la mer, disposant de deux systèmes de contrôle en montaison qui contrôleront les individus qui ne se sont pas arrêtés sur les affluents estuariens et qui poursuivent leur course sur le bassin de la Seine, plus amont.

 

J’ai raisonné en termes d’effectifs contrôlés. Sur la Seine, aujourd’hui, on a très peu de grands salmonidés migrateurs qui sortent de l’estuaire. La plupart restent concentrés sur les affluents estuariens où ils trouvent de quoi se reproduire. On trouve encore un peu de lamproies fluviatiles. On a encore un petit millier de lamproies marines en moyenne. Désormais, on a un décollement des effectifs d’aloses en sortie d’estuaire. Sur les rampes annexes à ces systèmes de vidéo-comptage, ces deux dernières années, nous avons à peu près 450 000 anguilles en montaison sur l’amont de la Seine.

 

Si l’on regarde l’opposé, sur les côtiers Normands, on se retrouve avec des reproductions naturelles plutôt remarquables. J’ai pris l’exemple du second parce que c’est le plus parlant en termes de réseaux de suivi et d’indices d’abondance. Même sur les rivières calcaires d’ex-Haute-Normandie, on a encore un signal non négligeable de reproduction naturelle, avec des signaux plus forts sur la partie plus ancienne et granitique, donc des rivières à saumon. Sur le bassin de la Seine en lui-même, les affluents estuariens ne produisent pas cette espèce ou alors ce sont des présences tout au plus sporadiques.

 

Ce qui nous permet de voir ces effectifs assez facilement, c’est parce que le bassin Seine-Normandie dispose de nombreux points de contrôle en montaison, surtout sur l’Arc normand. Si on regarde ce qui se passe sur les côtiers Normands, on a une population salmonicole parce qu’on a des cours d’eau fonctionnels et accessibles sur cette partie du bassin et des recrutements beaucoup plus faibles en anguille. L’enjeu est plutôt sur le bassin de la Seine. Les rivières calcaires comme la rivière Bresle à l’extrémité de la Normandie, recrutent très peu.

 

Si je mets les proportions en vis-à-vis, sur la Seine, on retrouve majoritairement des espèces avec un preferendum thermique beaucoup plus élevé, lamproie marine ou alose, et sur les rivières normandes, calcaires ou autres, on se retrouve avec des proportions en salmonidés beaucoup plus importantes et un enjeu anguille au niveau du bassin qui se joue sur la Seine. Ces constats sont aussi dus à des accessibilités différentes. Aujourd’hui, toutes espèces confondues, hormis l’anguille, des côtés sont relativement colonisés sur l’arc normand. Si on a encore un linéaire fréquenté sur la Seine, les têtes de bassin en mesure d’accueillir et de produire des populations salmonicoles ne sont pas encore atteignables.

 

Ce qui se passe entre ces deux systèmes, c’est que sur la Seine, des travaux visent à faire monter le poisson le plus haut possible. On fait de la construction d’ouvrages, de passes à poissons sur le domaine navigable de la Seine. En opposition, sur les côtiers Normands, nous avions des financements à 100 % pour les renaturations et les arasements ont été très nombreux. Sur cette partie normande, étant donné l’ampleur du réseau de suivi, aussi bien en anguilles qu’en saumons, d’un point de vue uniquement réglementaire pour connaître les tendances des populations, nous avons vu très rapidement les effets bénéfiques de ces mesures d’effacement. On a eu une idée, mais aussi une demande assez forte localement des porteurs de maîtrise d’ouvrage, qui était de suivre ponctuellement, à l’occasion de notre suivi, l’incidence de ces renaturations. Nous avons conservé notre méthode simple d’EPA rapide et normalisée, reproductible en tout point du bassin et générant un indicateur poisson fiable et comparable. On les a baptisés, parce qu’il fallait bien donner un titre au papier, les coups d’œil.

Je vais essayer de vous détailler trois exemples sur les rivières calcaires d’ex-Haute-Normandie, département Seine-Maritime et Eure. Si j’ai le temps, j’en citerai rapidement trois autres sur le reste de la Normandie. Nous sommes plutôt sur des petits bassins, maximum 70 kilomètres de long.

Le premier ouvrage que je vais vous citer, c’est le Moulin de Sénarpont. On est sur la rivière index à salmonidés et anguilles du bassin Seine-Normandie. Nous sommes encore sur un linéaire qui n’est pas vraiment accessible aux migrateurs. Nous avons choisi la truite fario puisque nous sommes sur une rivière calcaire à truites de mer. C’est la même espèce, il n’y a pas de souci. Je vous passe les détails de l’ouvrage. C’est un ancien moulin, deux mètres, un kilomètre de bief avec un verrou complet pour les migrateurs. L’objectif des travaux, c’était de remettre la rivière dans son lit fossile, reboucher l’ancien lit à l’aide d’excédents issus du terrassement et, pour le cas de figure présent, créer plusieurs bras de cours d’eau naturelle. Là, c’est un schéma des travaux terminés : de multiples bras, le bief comblé et l’ouvrage supprimé. Si nous faisons un bilan de ce qui a été fait, sous maîtrise d’ouvrage de l’EPTB Bresle, 235 mètres de linéaires de cours d’eau ont été créés, 300 mètres restaurés et 8 kilomètres d’accessibilité gagnée.

En termes d’évaluation et d’efficacité des travaux, après un inventaire dans le bief initial, nous avons fait un EPA à l’automne, neuf mois après. Et là, les résultats sont tout de suite parlants. On a multiplié par dix la densité de juvéniles de truites farios. On a un recrutement immédiat, amont, aval, mais aussi sur place, donc un indice qualifié de bon par la méthode EPA truite. Effectivement, on nous dit à ce moment-là, vous avez comparé un bief à un bras nouvellement créé, il n’y a pas photo entre les deux. On a poussé la méthode plus loin pour essayer de montrer que cette incidence se mesure au-delà de la zone de travaux. Pour entériner la chose et le marquer quelque part, on fait ce petit coup d’œil recto verso. On reprend toutes les caractéristiques que je vous ai montrées tout à l’heure en détail avec les résultats qui montrent les bienfaits des travaux mis sur cet ouvrage. Coup de chance ce jour-là, France 3 est venu nous voir. Nous leur avons expliqué la démarche. Cela nous a permis de passer au 19-20 de France 3 Baie de Seine. Nous avons expliqué pourquoi les productivités ont augmenté suite à l’effacement d’ouvrages. C’est un hasard.

 

Deuxième exemple, c’est quasiment la même chose, mais nous sommes beaucoup plus à l’aval sur cette même rivière index. Nous sommes sur un contexte migrateurs assez fort. Cette fois-ci, l’espèce cible, c’était le saumon atlantique, toujours avec le même type de moulin, la même hauteur, le même projet de renaturation avec un bief comblé, un bras renaturé, un ouvrage répartiteur supprimé. Ici, vous avez le schéma qui avait servi à la communication avec le bras fraîchement refait, le bief comblé et le bras renaturé ici. Vous l’avez ici en vue de drone quelques mois après travaux, quand la végétation a repris ses droits, aussi bien en ripisylve que sur le fond de la rivière. On est sur une incidence plus importante, 360 mètres de linéaires de cours d’eau créés et 200 mètres de linéaire restaurés. On est parti sur l’indice d’abondance saumon. Nous avons eu la surprise que, malgré cette rivière calcaire à truites de mer, l’habitat nouvellement créé a été beaucoup plus favorable à l’espèce saumon. La densité a été augmentée d’un facteur presque 20, qu’on peut qualifier d’un niveau excellent. Encore faudrait-il que cela se maintienne dans le temps, parce que le faciès reprendra plutôt des conditions plus favorables pour la truite dans les années à venir. La même chose, un coup d’œil recto verso qui permet de reprendre l’ensemble des travaux réalisés et les résultats bénéfiques qui ont pu en être tirés. Là aussi, coup de chance, quelqu’un dans l’équipe a fait en sorte de faire remarquer ces travaux par l’Education nationale. Cette petite note a été retenue au chapitre L’Humanité et les écosystèmes de l’édition biologie niveau 1ère de l’Education.

 

Ce que je disais tout à l’heure, pour ne pas dire qu’on ne compare que les anciens biefs comblés avec les parties naturelles, cette année, sur le Moulin de l’Abreuvoir, un peu plus haut sur la Bresle, on s’est intéressé à faire les mêmes indices, beaucoup plus à l’aval de l’ouvrage, hors incidences directes travaux, pour montrer que là aussi, qu’on fasse une comparaison entre bief linéaire naturel ou linéaire aval et ancien ouvrage, on a la même augmentation de proportion en termes de juvéniles de truites farios sur le cours d’eau.

 

Je change de catégorie de travaux. On est plus sur un équipement vannes ouvertes. On va vers l’ouest, dans le département de l’Eure. On est sur un petit affluent de la Risle estuarienne, elle-même affluent de la Seine, qui a un barrage bloquant en fond d’estuaire, qui incite tous les poissons migrateurs qui s’engagent, à remonter uniquement ce petit affluent de la Risle.

 

A ce moment-là, 80 % de la production des truites de mer s’effectuent sur un linéaire exploitable de moins de trois kilomètres, puisque vous avez rapidement, sur ce petit cours d’eau, un ouvrage bloquant qui empêche toute reproduction plus amont. Le moulin, vous l’avez ici, avec un grand radier aval qui ne permet pas la montaison des individus et provoque des accumulations de frayères de truites de mer à l’aval. Si l’on regarde l’impact anguille, on avait, de part et d’autre de l’ouvrage, une population très jeune avec du recrutement pour la moitié de la population à l’aval de l’ouvrage bloquant, et à l’amont, une population vieillissante et sédentaire.

 

A partir de ce moment, la Fédération de Pêche de l’Eure a pris la maîtrise d’ouvrage de ces travaux en créant deux rampes en enrochement scellé et des blocs scellés sur le radier béton pour augmenter le tirant d’eau. Cette Fédération fait des suivis de frayères tous les ans sur ce petit cours d’eau. Après l’aménagement du moulin, deux fois plus de fréquentations par les géniteurs, avec 370 géniteurs sur ce petit affluent et désormais 13 kilomètres de cours d’eau complètement exploitables par l’espèce, soit un gain de 76 %. Si l’on regarde ce qui s’est passé côté anguille, même chose amont travaux, on se retrouve avec trois quarts de la population jeune au moins en migration active et un recrutement optimisé, avec près de 40 d’augmentation des juvéniles de l’année et plus de 70 % dans la migration active sur le bassin à l’amont de l’ancien ouvrage.

 

Si on regarde ce qui se passe sur la Seine, ce n’est pas du tout la même chose. On est sur des passes à poissons ou des rivières artificielles de contournement. Cela crée de l’habitat aussi, mais pas suffisamment. Si on revient en arrière sur ce qui s’est fait en termes d’aménagement d’ouvrages sur la Seine, à la louche, nous avons plus de 80 ouvrages VNF à entretenir sur le bassin de la Seine. Ce qui nous intéresse pour refaire remonter les poissons migrateurs sur leur zone de frayère historique, c’est à peu près une cinquantaine d’ouvrages à équiper :

  • en 2003, seuls quatre ouvrages étaient équipés sur ce pool de 50 ouvrages à équiper sur le bassin de la Seine pour espérer faire reproduire des poissons migrateurs ;
  • en 2010, nous en avions une douzaine. Des fronts de colonisation commençaient à avancer, mais nous n’avions pas davantage de poissons contrôlés en sortie d’estuaire parce qu’on a toujours un ouvrage qui n’est pas complètement équipé et une passe assez filtrante ;
  • en 2016, nous avions 20 ouvrages équipés, un axe Seine-Oise qui commence à s’ouvrir, mais toujours ce premier obstacle en fond d’estuaire partiellement équipé avec une passe qui n’est pas très fonctionnelle, du coup on n’observe pas plus de résultats que cela ;
  • en 2018, nous avons désormais 27 ouvrages équipés et un axe Seine-Oise complètement ouvert, à peu de choses près, et surtout un déblocage complet en sortie d’estuaire avec la mise en conformité d’une deuxième rampe sur la berge d’en face.

 

De manière concomitante, l’année précédente, nous avons eu l’installation de deux stations de contrôle, une nouvelle rive droite, complémentaire de celle rive gauche et une à l’amont sur l’Aisne, affluent de l’Oise, distante toutes les deux de 240 kilomètres. Avec l’ouverture de cet axe, nous avons pu observer, à 400 kilomètres de la mer sur cet axe nouvellement accessible avec le déblocage du fond d’estuaire, aussi bien saumons, truites de mer et aloses, qui sont pratiquement arrivés aux frontières du département de l’Aisne. Les premières aloses arrivent sur la Seine arrivent en mars avril à peu près et on les retrouve quinze jours plus tard sur l’Aisne, 240 kilomètres plus en amont. Les proportions que je vous ai mises là, ce sont les proportions de poissons qu’on observe à l’amont de ce qui est passé à l’aval. Vu les chiffres que je vous ai donnés tout à l’heure, cela reste encore très faible.

 

Si je reprends uniquement les effectifs d’aloses qui sont assez importants, à partir de 2017, quand on commence à ouvrir les deux rives et que nous avons de quoi compter ce qui monte plus amont avec un axe Seine Oise déjà ouvert, les effectifs de cette espèce se sont envolés depuis trois ans, avec désormais 3 500 individus. On en retrouve 240 kilomètres plus amont à près de 400. Malheureusement, elles ne s’engagent pas toutes sur l’Oise. Celles qui se sont engagées sur la partie parisienne et qui sont passées par la Métropole, se sont trouvées confrontées à l’aval des ouvrages pas encore équipés comme Suresnes et Joinville, avec énormément de captures d’aloses qui nous ont été rapportées cet été, tout autour de la petite couronne. En 2011, nous avions déjà eu des cas de reproduction naturelle avec deux alosons retrouvés en Seine-et-Marne, sur la Seine et sur un affluent de la Marne, alors qu’à l’époque, seuls 450 géniteurs avaient franchi l’estuaire. Nous espérons que cette année, avec cet axe rouvert, nous commencerons à avoir des reproductions naturelles.

 

Même chose, cet axe rouvert a permis 50 kilomètres plus amont, dans le département de l’Aisne, la capture d’une truite de mer, il y a un an maintenant sur des pêches à la ligne. En début des années 2000, on avait des signaux de capture, mais sur des pêches d’inventaire de bureaux d’études avec des efforts de pêche conséquents. Désormais, on n’a que des signaux par pêche de loisir à la ligne. Cette truite avait fait 450 kilomètres, parcouru 11 obstacles tous équipés, quatre sur la Seine et sept sur l’Oise. L’année suivante, même chose, mais celle-ci a choisi la voie de la difficulté. Elle a parcouru à peu près la même distance, 420 kilomètres, également, 11 obstacles. Elle en a franchi cinq non équipés. Elle est passée sur le jeu des écluses de navigation pour arriver à ce point de capture sur la Seine du côté de Melun, toujours en Seine-et-Marne. On est sur des poissons qui commencent à se rapprocher de leur zone de reproduction naturelle. Pas sur la Seine, mais sur l’Oise, nous sommes désormais à une petite cinquantaine de kilomètres des zones cartographiées comme favorables pour la reproduction de ces espèces.

 

Pour conclure, ce qu’il faut retenir de ces exemples de restauration, c’est qu’il y en a beaucoup sur le bassin Seine Normandie, notamment en Normandie en termes d’aménagement. Deux ouvrages bloquants sur l’Eure, un affluent de la Seine, ont été équipés et ont permis de saturer en reproduction de lamproie marine de 80 % de son linéaire. Trois seuils de cinq mètres cumulés ont été supprimés sur l’Orne dans le Calvados, ce qui a permis une colonisation immédiate par le saumon Atlantique et des densités qui ont pu atteindre 24 individus pour 100 mètres carrés, ce qui est assez excellent. Et l’aménagement d’une cinquantaine d’ouvrages sur la Touques dans le Calvados, avec la mise en service d’une step majeure qui a permis d’atteindre 96 % des surfaces de reproduction accessibles et le doublement des effectifs contrôlés à l’aval.

 

Nous avons des bénéfices palpables, mais sur les côtiers Normands, des exemples viennent les contrecarrer. Malgré tout leur incidence, c’est parfois perceptible qu’à l’échelle de l’ouvrage supprimé ou équipé et les bénéfices au niveau du bassin sont beaucoup plus longs à percevoir. Dans tous les cas, il ne s’agit que du traitement d’une pression anthropique parmi d’autres moins évidentes. Une pression en cache une autre, tout particulièrement sur la qualité d’eau. Nous avons des exemples dans le département de la Manche où des mêmes aménagements et des mêmes suivis n’ont pas conduit aux mêmes résultats, parce que ces bassins étaient plus petits avec des capacités de dilution inférieures. Le contexte agricole était tout aussi similaire, mais la qualité de l’eau n’a pas permis cette productivité. Les productivités enregistrées après travaux ne sont pas toujours très stables dans le temps. Nous avons des effets de colonisation, puis ça disparaît. Nous avons aussi une évolution de l’habitat nouvellement créé qui favorisera une espèce plus qu’une autre.

 

Sur la Seine, là aussi, il y a quand même des parenthèses à prendre. Bien que l’eau de la Seine soit devenue respirable d’un point de vue piscicole, la fonctionnalité des cycles reste encore précaire et n’est contenue qu’à l’aval, sans parler des pollutions régulières comme Achères ou Lubrizol. Ces percées des fronts de dévalaison attestent de la fonctionnalité des équipements des ouvrages qu’il faut quand même entretenir. Il reste néanmoins rendre les zones de reproductions accessibles et fonctionnelles et s’assurer de la dévaluation des juvéniles sans induire de retard à la migration. Même si on leur fait attendre leurs zones de reproduction, il faut assurer le trajet retour. Face à la longueur de l’axe de migration sur un bassin très anthropisé, si l’équilibre montaison reproduction dévalaisons devait être atteint, il resterait, à mon avis, encore très instable.

 

Je tiens à remercier toutes les structures qui m’ont permis de mettre en lumière toutes ces données et ces bénéfices en faveur de la restauration des habitats, tout particulièrement mon équipe qui m’a permis de vous montrer ces figures richement illustrées."

L'ensemble des retranscriptions

Vous pouvez retrouver l'ensemble des propos tenus lors de ces journées techniques nationales en cliquant ici.